Qu'est-ce que la simulation thermique dynamique ?
Dans le bâtiment, la simulation thermique dynamique est apparue dans les années 1970-1980, parallèlement à l'application des premières réglementations thermiques. L'intérêt de ce calcul mathématique ? Décrire l'évolution temporelle de l'état thermique d'une construction. Il permet d'apprécier les phénomènes thermiques de systèmes difficiles à appréhender globalement sur le cycle complet d'une année : impact des apports gratuits, effets de masque ou de brise-soleil…
Comparés aux premiers outils de simulation utilisés dans les années 1970 – au pas mensuel et dont beaucoup ne prenaient pas en compte la dynamique des évolutions –, les logiciels actuels fournissent une richesse de données indispensable pour affiner la prévision de comportement des bâtiments ou le dimensionnement des équipements.
Par ailleurs, les logiciels de STD entrent aussi en compétition avec les tableurs chargés de macros que tout bon ingénieur se constitue au fil de son expérience. En effet, la simulation thermique dynamique peut tout aussi bien convenir pour préparer des données ou pour présenter les résultats, et parfois même de façon plus attrayante.
Les professionnels exploitent aujourd'hui des modèles numériques que l'on retrouve dans les différents logiciels disponibles : ArchiWizard, Blast, Climawin, DesignBuilder, Pleiades+Comfie, Energy+, Simbad, TRNSys, Virtual Environment… Selon la qualité des bases de données utilisées, le comportement annuel des systèmes étudiés est lisible au pas de temps horaire, voire au pas de temps de quelques minutes.
A quoi sert la simulation thermique dynamique ?
Fondamentalement, les logiciels de STD décrivent les échanges thermiques classiques (convection, conduction, rayonnement, changement d'état). Leurs développements récents leur confèrent aussi la capacité très appréciée :
- de dimensionner les solutions énergétiques complexes en développant une approche globale (prise en compte de différentes sources d'énergie, du bilan carbone, de l'énergie grise…)
- d'évaluer le confort d'hiver comme d'été, selon un pas de temps fin
- de procéder à une approche globale de l'éclairage (en tenant compte de la lumière naturelle et de la modulation de l'appoint artificiel, des protections solaires...)
- de simuler l'impact du vent sur les façades, les phénomènes de ventilation naturelle, l'intérêt d'un puits climatique
- et surtout, d'estimer les consommations réelles d'énergie à partir des informations sur l'enveloppe du bâtiment, de son inertie, des systèmes énergétiques (quelle que soit l'énergie exploitée et en prenant en compte les apports gratuits externes ou internes), du comportement des occupants et du climat local
La « reproduction » du comportement d'un système (ci-dessous) démultiplie les possibilités d'analyse d'une construction.
Les atouts de la simulation thermique dynamique
Les logiciels de STD contribuent à :
- améliorer le dimensionnement d'un bâtiment
- fournir au maître d'ouvrage et maîtres d'oeuvre une approche la plus réaliste possible du fonctionnement thermique du bâtiment
- présenter une information argumentée à l'exploitant de l'ouvrage pour préparer le commissionnement et son fonctionnement courant
- évaluer les systèmes innovants dans des configurations particulières (canicules, grands vents, sur-occupation...)
- optimiser la conception à l'aide d'études de sensibilité en intégrant des phénomènes complexes et transitoires
- concevoir des projets avec des approches, des systèmes, des techniques non courantes et/ou manquant de retours d'expériences
Si la simulation thermique dynamique permet d’optimiser la conception et le dimensionnement d’un bâtiment, c’est parce qu’elle associe très intimement:
• les données liées à l'enveloppe de l'ouvrage
• les données qui ont trait à son système technique
• les données climatiques locales
• les scénarios d'usage du bâtiment
Méthodologie STD : les 6 étapes à suivre
En tant que praticiens des logiciels de STD, plusieurs adhérents de l'association ICO (notamment Bruno Georges, ITF, Benoît Maraval, Adret, et Jean-Pascal Agard, Atmosphère) ont travaillé à la définition d'une méthode en 6 étapes :
1. Analyser : quel est mon domaine d'étude ?
Cette phase fondamentale a pour objet de cerner la ou les questions à traiter par simulation thermique dynamique, tout en imposant au praticien de cadrer son intervention.
2. Comprendre : quels sont les phénomènes physiques mis en jeu ?
Concrètement, les constructions étudiées par simulation thermique dynamique sont des ouvrages complexes. Cela demande donc une forte expertise :
- des compétences en thermodynamique
- une expérience approfondie des bureaux d'études
- une bonne connaissance des outils logiciels
- et une maîtrise des ordres de grandeurs à manier
Les ingénieurs et techniciens qui se penchent sur un dossier disposeront nécessairement de solides pré-requis théoriques.
Un calcul thermique par simulation thermique dynamique nécessite, outre l'outil logiciel, quelques bases de données indispensables :
• les informations climatiques
• les données techniques complètes et pointues sur l'ouvrage (matériaux d'enveloppe participant à l'isolation et à l'inertie, organisation et types de surfaces vitrées, équipements techniques…)
• les scénarios d'occupation et d'activités
3. Représenter et modéliser : quels modèles physiques, mathématiques et empiriques seront employés ?
Il est conseillé de poser, si possible de manière contractuelle, les données de base d'un projet. Ces informations seront validées avant le montage du modèle par l'architecte et l’économiste, d'une part, et par le maître d'ouvrage, d'autre part. Les pratriciens reconnaissent d'ailleurs qu'il n'existe pas de logiciels STD « défaillants ». En cas d'erreur d'évaluation, ils préfèrent souligner qu'il s'agit généralement d'appréciations liés aux utilisateurs eux-mêmes.
En premier lieu, les opérateurs disposeront de connaissances en physique suffisantes pour manier les applications. Cela signifie aussi de maintenir leurs notions théoriques, de valider les résultats par un réflexe de « bon sens » et de balayer les « vieilles » habitudes.
En second lieu, les praticiens préconisent un travail « par petits pas », ce qu'ils résument par une démarche en 3 temps :
• Être formé à la simulation, et pas seulement à l'outil exploité par le bureau d'études
• Utiliser, dans un premier temps, des outils jugés « simples », comme Pleiades+Comfie ou leur équivalent
• Passer ensuite aux applications plus puissantes et complexes comme Energy+ ou TRNSys
4. Simuler : ai-je bien identifié une image du problème à résoudre ?
Comme toute réflexion rationnellement menée, l'opération de simulation thermique dynamique demande de se poser initialement la question de ce que l'on recherche. Par exemple : « modéliser une pompe à chaleur par une matrice de coefficient de performance et non mettre en évidence le modèle pour une pompe à chaleur spécifique ». En clair, ne pas simuler ou reproduire la réalité mais trouver une image du problème à résoudre.
Par ailleurs, d'expérience, il est plus rapide et plus fiable de réaliser une simulation par problème : le confort d'été dans quelques zones judicieusement choisies ou systématiquement retenues ; la consommation énergétique, avec une vision globale et exhaustive du bâti et des systèmes…
• L'opérateur chargé de la simulation doit être légitimé auprès des autres concepteurs
• L'intervention doit être planifiée afin de l'inscrire dans le processus de conception, avec un phasage du rendu de son travail en cours d'avant-projet sommaire (APS)
• La délégation accordée à l'opérateur doit permettre d'intégrer contractuellement les résultats de simulation dans les documents de conception (le réalisateur en assume ainsi la responsabilité)
• Enfin, les résultats doivent être transmis aux décideurs du projet, de manière formelle et pédagogique
5. Interpréter : quel angle choisir ?
Les études courantes de simulation thermique dynamiques portent :
- sur les conditions de confort d'été, avec calcul des dépassements de seuils et présentation de la situation sous forme de diagramme de Givoni ou de Brager
- sur l'optimisation de l'enveloppe en vue des la minimisation des besoins de chauffage, de rafraîchissement et d'éclairage
- sur l'aide au choix de systèmes techniques, comme la comparaison entre différents types d'émetteurs
- sur l'optimisation du dimensionnement, avec la présentation de monotones de puissance;
- sur le calcul des consommations énergétiques, avec engagement sur les performances dans le cadre de contrats de réalisation entretien et maintenance (CREM), de contrats de performance énergétique (CPE) ou de partenariat public-privé (PPP)
Elles tiennent :
• à la méconnaissance des limites du logiciel
• à certaines libertés – de « bidouilles » – prises avec les données pour obtenir un résultat conforme avec la réglementation thermique
• à l'incompréhension toute théorique des concepts manipulés
• à la production d'une simulation trop détaillée ou trop compliquée
• à la réalisation d'une modélisation globale visant à traiter différents problèmes
6. Synthétiser : quelles informations clés à mettre en valeur ?
Les informations sont livrées de manière à la fois complète (sous forme de fichiers de données) et démonstrative. Elles renseignent sur :
- l'évolution des températures selon un pas de temps fin (généralement horaire, voire de 10 minutes) en différentes zones du bâtiment et sur toute l'année
- les puissances thermiques (chauffage, rafraîchissement, ventilation) dimensionnées de manière optimales
- les consommations prévisionnelles annuelles du bâtiment
Ces résultats sont fournis sous la forme de courbes de température, de diagrammes, de flux présentant le bilan des apports et des déperditions thermiques, voire d'une modélisation 3D de l'ouvrage.
Les limites de la simulation thermique dynamique
Les données d'entrée
Selon les praticiens, les logiciels de STD sont validés sur la base de cellules tests ou par comparaison entre logiciels. Or, la « robustesse » des données de sortie dépend plus de la pertinence des données d'entrée que du logiciel utilisé.
Les données météorologiques figurent parmi les plus importantes. Il n'existe pas de fichier idéal, et, selon l'analyse, l'opérateur opérera une sélection des informations pertinentes. Exemple : si le calcul par STD doit établir un bilan prévisionnel de consommation réaliste, on sélectionnera un fichier météorologique correspondant à une moyenne des années précédentes. En revanche, s'il porte sur les conditions de confort d'été en l’absence de climatisation, il peut être utile de retenir un été plus chaud qu’une saison moyenne des 10 à 15 dernières années, voire un été extrême comme celui de 2003.
Les hypothèses de base élaborées sur le modèle de la « zone »
Une zone représente un local ou un groupement de locaux défini par une température d'air unique, quelle que soit la position à l'intérieur de cette zone. Cette notion s'affranchit des phénomènes de stratification ou de convection localisés qui pourraient y survenir suite à un échauffement, par exemple sur une paroi. Cette limite pose des difficultés lors de la modélisation de volumes importants, de type atrium.
La modélisation des transferts d'air entre zones et l'extérieur, et entre zones elles-mêmes
Dans la plupart des logiciels de STD, les transferts d'air doivent être saisis par l'utilisateur et définis au préalable. Ce qui interdit la modélisation des phénomènes aléatoires et non prévisibles, comme la ventilation naturelle par l'ouverture des fenêtres ou des transferts d'air par convection naturelle, notamment dans un atrium. Certains logiciels disposent cependant d'algorithmes simplifiés de calcul de transfert d’air.