Quelle est la mission de l’Association pour une chaleur durable que vous présidez ?
Peter Cool : Notre association regroupe les entreprises manufacturières dans le domaine du chauffage durable, efficace et confortable du bâtiment. Nous travaillons sur la PAC hybride individuelle et sur de nombreux autres thèmes importants pour notre industrie. Dans le cadre d’un dialogue constant avec diverses organisations gouvernementales et industrielles, nous sommes très impliqués sur la partie normative ainsi que sur la congestion des réseaux électriques, les gaz verts, l’hydrogène ou encore les légionelles.
Peter Cool
président de Vereninging duurzame warmte
Quelle place tient le gaz dans le mix énergétique des Pays-Bas ?
P. C. : 3e pays producteur de gaz en Europe, les Pays-Bas sont engagés dans la voie de la défossilisation et de la décarbonation. La part du gaz baisse tendanciellement dans le mix énergétique : 43 % de gaz en 2021, contre 49 % en 2010. Depuis 2018, il est interdit d’installer une chaudière à gaz seule dans les maisons neuves, mais, dans l’existant, le gaz reste la source de chaleur principale. 80 % des 8,5 millions de foyers sont connectés au gaz. La décision d’arrêter l’exploitation du champ de Groningue, qui produisait depuis 1963, a été votée par le Sénat, en raison des tremblements de terre qu’elle occasionnait. C’était totalement inattendu par de nombreuses organisations.
Pourquoi privilégiez-vous l’hybridation des solutions pour le chauffage des logements ?
P. C. : Un élément que nous ne pouvons pas ignorer est le risque de congestion du réseau électrique. C’est pourquoi deux provinces des Pays-Bas recommandent à présent d’utiliser des PAC hybrides. Compte tenu de la pression actuelle sur le réseau, une PAC hybride est une solution pertinente, car elle consomme moins d’électricité et offre le choix entre le gaz et l’électricité. Sur le marché néerlandais, il se vend annuelle ment entre 20 000 et 25 000 PAC hybrides. C’est le type de PAC le plus vendu ces deux dernières années. Une PAC hybride peut être utilisée dans la plupart des situations sans nécessiter de modifications majeures et apporte une contribution considérable à la transition énergétique. C’est un système efficace qui consomme en moyenne 75 % de gaz en moins qu’une chaudière et moins d’électricité qu’une solution 100 % PAC. Cela s’inscrit parfaite ment dans la vision d’un patrimoine bâti chauffé de manière durable et confortable, avec un coût social le plus bas possible et une réduction significative des émissions de CO2.
Quelles sont, selon vous, les perspectives pour le marché néerlandais ?
P. C. : En mai 2023, le gouvernement néerlandais avait introduit une norme pour les nouveaux systèmes de chauffage, qui visait à éliminer progressivement les chaudières à gaz à partir de 2026. L’exclusion des chaudières à gaz a depuis été levée. Il n’en reste pas moins que nous nous attendons à ce que les PAC hybrides connaissent une forte croissance : nous prévoyons un véritable essor des PAC hybrides individuelles au cours des cinq prochaines années. Il existe par ailleurs des solutions collectives avec des PAC hybrides installées sur les toits des immeubles. Il y a une sorte de dicton néerlandais qui dit que vous volez dans votre propre portefeuille si vous n’optez pas pour une pompe à chaleur hybride lorsque vous devez remplacer votre ancienne chaudière à gaz ! L’étude que nous avons publiée en octobre 2024 (« Deux hivers avec 200 PAC hybrides ») a permis de démontrer que la PAC hybride joue un rôle clé dans la réalisation des objectifs climatiques, avec un potentiel de réduction de 1,7 million de tonnes de CO2 si un tiers des maisons individuelles hybrident leur chaudière.
Quel rôle joue le gaz vert dans cette transition ?
P. C. : Pour préserver leur souveraineté énergétique, les Pays-Bas, qui disposent d’un excellent réseau gazier, renforcent leurs objectifs de production de biométhane. Près d’une centaine d’unités de biométhane sont déjà opérationnelles et fournissent actuellement de l’ordre de 2 % des besoins de gaz du pays (chiffre 2023). L’ambition est portée à 22,6 TWh d’ici à 2030, ce qui représenterait environ 15 % de la consommation néerlandaise de gaz. Afin de stimuler la production de gaz vert, généralement plus coûteux à produire que le gaz conventionnel, une part croissante de biométhane devra obligatoirement être injectée dans le réseau gazier néerlandais à partir de janvier 2026. Elle pourrait être de 5,6 % pour 2027, selon le projet de loi.
Propos recueillis par Anna Nemanic / Dominique Ortin-Meaux
Projet de démonstration « Deux hivers avec 200 PAC hybrides »
L’objectif était d’analyser les impacts de l’installation d’une solution hybride dans 200 maisons différentes, tant par leur âge que par le type de construction. La principale conclusion est que les systèmes de chauffage hybrides permettent en moyenne une réduction de 75 % des émissions de CO2 dues au gaz et une réduction des coûts énergétiques annuels d’environ 1 000 euros, davantage encore si la PAC hybride est couplée à une installation solaire. Compte tenu des prix actuels (mi-2024) de l’énergie et des subventions, l’investissement dans une solution hybride est amorti en 5 ans, dans 80 % des cas. Les résultats de l’étude ont surpris les participants. En effet, l’économie de gaz comme la performance réelle de la solution hybride sont nettement meilleures que ce qui avait été calculé à l’origine. Cela se justifie par le fait qu’avec une solution hybride l’installation de chauffage existante est utilisée de manière beaucoup plus efficace.