Gaz verts : La transition, c'est maintenant !

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11 millions de foyers raccordés au réseau de distribution : le gaz conserve une place essentielle dans le mix énergétique français. Pour assurer la transition et faire face à la crise énergétique actuelle, tous les yeux se tournent vers les gaz renouvelables. Retour sur la série de conférences présentées lors d’Interclima 2022.

De 44 en décembre 2017, le nombre de sites d’injection dépassera 500 en fin d’année 2022. La dynamique est bel et bien lancée. « Il n’y a pas UN mais DES gaz renouvelables », avertit Youness Hssaini, responsable efficacité énergétique, GRDF Cegibat. Le biométhane, filière la plus mature, connaît un développement très rapide.

100 % de gaz vert français en 2050, c’est possible

Face au succès de cette énergie renouvelable, stockable et pilotable, la question alors que nous nous posons face à une crise qui touche toutes les énergies est la suivante : aurons-nous assez de gaz renouvelable dans l’avenir pour couvrir tous les usages du territoire ? La réponse se trouve dans le rapport « Perspectives Gaz 2022 ». Celui-ci met en évidence le potentiel de production de gaz renouvelable de 430 TWh à l’horizon 2050 en s’appuyant sur plusieurs technologies : méthanisation, pyrogazéification, gazéification hydrothermale, méthanation et hydrogène. Un volume à rapprocher des consommations estimées pour 2050 à 312 TWh (contre 481 TWh en 2020), en raison des efforts de sobriété et de réduction des consommations d’énergie apportées par la rénovation des bâtiments. « 430 TWh de méthane renouvelable pour des besoins évalués à 312 TWh, on voit que l’équation fonctionne pour 100 % de gaz vert et français en 2050 ! » poursuit-il. La pyrogazéification, notamment, occupera un rôle important dans l’atteinte de cet objectif, avec un potentiel de 90 TWh. L’un de ses principaux intérêts : elle utilise d’autres intrants que ceux de la méthanisation en exploitant majoritairement des déchets qui auraient été incinérés ou enfouis et contribue en parallèle à la perspective européenne de diviser par deux les quantités de déchets d’ici à 2025.

Alice Francou (Antargaz), Frédéric Aguile (GRDF), Youness Hssaini (GRDF, Cegibat)
Alice Francou (Antargaz), Frédéric Aguile (GRDF), Youness Hssaini (GRDF, Cegibat)

Une forte dynamique sur le biométhane

Avec 8 TWh de capacité d’injection installée, le biométhane représente environ 2 % de la consommation française de gaz, ce qui correspond à la consommation de 2 millions de logements neufs. Dans les 3 ans à venir, 25 TWh supplémentaires (l’équivalent de 6,5 millions de logements neufs) pourraient être produits si l’on se réfère aux 1150 projets inscrits sur le registre des capacités. « Le gaz vert est produit dans de petites unités et on en mesure trop peu les effets sur le verdissement du réseau de gaz. Mais avec les porteurs de projet, on met en place en France l’équivalent d’un réacteur nucléaire tous les 2 ans ! », souligne Jérôme Chambin, directeur Développement de GRDF. À des coûts de production qui devraient baisser à la faveur de l’évolution des technologies : « Il en coûte actuellement 90 euros pour produire 1 MWh de biométhane. On peut tabler sur une baisse de l’ordre de 35 % d’ici à 2030 », estime Youness Hssaini.

Injecté dans le réseau, le biométhane se mélange au gaz naturel dont il partage les qualités et assure les mêmes usages. Pour les consommateurs, le moyen de justifier qu’ils s’alimentent en biométhane passe par le mécanisme des garanties d’origine (GO) « Quand 1 MWh est injecté dans le réseau, une garantie d’origine est créée et inscrite dans le registre qui trace l’origine de la molécule. Ces GO sont détruites à mesure qu’elles sont consommées. C’est le moyen le plus simple actuellement pour souscrire une offre gaz vert auprès du fournisseur de son choix », explique Frédéric Aguillé, expert réglementaire à la direction développement de GRDF. D’autres dispositifs se développent. Le compte acheteur-non fournisseur permet de se procurer des garanties d’origine directement sur le registre des GO sans être soi-même fournisseur, et en étant décorrélé du marché du gaz. « Ce mécanisme est opérationnel et ouvert à tous les acteurs, même s’il s’adresse en priorité aux gros consommateurs, tels que les bailleurs sociaux, les collectivités ou les industriels », poursuit Frédéric Aguile. Enfin, deux autres scénarios sont déjà encadrés au plan réglementaire : le financement de la production de biométhane permettant de s’impliquer dans l’émergence de nouvelles installations de méthanisation via un fonds de financement participatif et le contrat d’achat long terme.

Site de production de biométhane
Site de production de biométhane

Le plan ambitieux de la commission européenne pour 2030

Dans le contexte de l'invasion de l'Ukraine par la Russie et de la hausse des prix de l'énergie, la Commission européenne a lancé « REPowerEU », le plan qui vise à rendre l'Europe indépendante des combustibles fossiles russes bien avant 2030. Objectif :  accélérer la production de biométhane à l’échelle européenne pour parvenir à 350 TWh à un horizon court de 2030. Pour atteindre cette cible extrêmement ambitieuse, le Partenariat industriel pour le biométhane (BIP) a été lancé le 28 septembre par REPowerEU. « Cette initiative est un instrument essentiel pour orienter la coopération afin de stimuler l'innovation technologique, d'éliminer les goulets d'étranglement tels que les échanges transfrontaliers et, finalement, d'accélérer l'expansion de l'industrie », souligne Youness Hssaini. La perspective française de 20 % de biométhane dans la consommation de gaz en 2030 permettrait d’effacer totalement les approvisionnements russes… Sachant que de 17 % en 2021, ils ne pèsent déjà plus dans les importations depuis la fermeture des robinets en septembre 2022.

Bernard Aulagne (Coénove)
Bernard Aulagne (Coénove)

Une mention pour ancrer les gaz verts dans l’esprit des consommateurs

Selon les résultats d’une enquête réalisée par BVA* sur la perception des gaz renouvelables, les gaz verts bénéficient d’une forte notoriété (84 % des personnes interrogées en ont entendu parler), mais le niveau de connaissance reste insuffisant (seuls 24 % savent exactement ce dont il s’agit et 50 % ont compris qu’ils sont compatibles avec leurs équipements actuels). Pour Bernard Aulagne, président de Coénove, c’est le signe qu’il faut renforcer la communication.  En lien avec la filière, l’association vient de lancer la mention « Gaz Vert ». Elle se décline en :

  • une étiquette « Compatible Gaz vert » que les fabricants et les techniciens de maintenance sont invités à apposer sur les appareils gaz
  • une démarche « Acteur engagé / Gaz Vert / Local et renouvelable », à laquelle peuvent souscrire des promoteurs, des constructeurs,  des installateurs, des bailleurs sociaux ou des villes et des territoires afin de marquer leur soutien au développement du biométhane.

« Nous partageons tous les enjeux de décarbonation, mais nous sommes convaincus, au sein de l’association Coénove, que la seule façon d’y arriver est une approche fondée sur une véritable complémentarité des énergies, un mix énergétique diversifié dans lequel le gaz, et notamment le gaz renouvelable, a toute sa place », insiste Bernard Aulagne.

Une position à laquelle souscrit pleinement GRDF, qui promeut la méthanisation et l’injection de biométhane dans les réseaux depuis 2014. « La crise énergétique nous redonne des volets d’opportunité. Alors que nous avions du mal à nous faire entendre des pouvoirs publics sur l’impératif de maintenir un mix énergétique équilibré et sur la capacité à décarboner le gaz en accélérant la méthanisation, nous voyons un intérêt accru pour le biométhane », complète Jérôme Chambin. Et depuis juillet, des petites victoires viennent confirmer ces dires, notamment les deux textes de loi publiés en septembre (2), qui fixent des règles plus favorables au déploiement des projets de méthanisation en vue de l’injection dans les réseaux.

 

(1) entre le 18 mai et le 6 juin 2022

(2) Décret n° 2022-1248 du 20 septembre 2022 relatif à l'allongement du délai de mise en service des projets d'installations de production de biométhane et Arrêté du 20 septembre 2022 portant modification de l'arrêté du 13 décembre 2021 fixant les conditions d'achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel

Logo Gaz vert
Logo Gaz vert

Quand le résidentiel choisit le gaz vert : Deux exemples concrets

  • En maison individuelle

La Maison 4 Saisons est une construction bioclimatique, conçue par Maisons Battais, constructeur de maisons individuelles de la région rennaise. « Nous ne vivons pas la RE2020 comme une contrainte : avec la PAC hybride associée à un plancher chauffant rafraichissant et un ballon ECS, nous avons trouvé la solution qui permet de répondre aux limites d’émissions de CO2 et de travailler le mix énergétique, puisque la PAC est couplée à une chaudière gaz, indique Jean-Pierre Battais. Résultat, une maison classée A en consommations énergétiques et en émissions de CO2. La PAC hybride étant connectée, vous pouvez vous délester du réseau électrique s’il le faut. Quant au gaz vert, le message passe bien auprès de nos clients. Tout le monde apprécie les circuits courts et l’économie circulaire. Et la région est fortement productrice de biométhane ! »

  • Dans l’habitat social 

Économie circulaire aussi dans le sud de la France, où Habitat Marseille Provence a fait le choix du biométhane en se fournissant en garanties d’origine auprès de la station d’épuration de Sormiou. Le bailleur social a profité du renouvellement de son contrat de fourniture de gaz pour intégrer une partie de gaz vert, accompagné par Smart Avenir Energies. Depuis janvier 2022, six chaufferies d’une résidence de La Soude, à Marseille, sont alimentées à 100 % en biométhane. « L’opération s’est faite sans surcoût pour les locataires : c’était une condition du cahier des charges - et avec un vrai intérêt en termes d’économie circulaire », souligne Steeve Giorno, ingénieur efficacité énergétique GRDF.

Steeve Giorno (GRDF), Franck et Jean-Pierre Battais (Maisons Battais)
Steeve Giorno (GRDF), Franck et Jean-Pierre Battais (Maisons Battais)

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