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Dossier Technique

Le besoin d’eau chaude sanitaire dans les établissements de santé

Mis à jour le
4.5/5 (19 avis)

Depuis la parution du guide Ademe sur le réel besoin d’eau chaude sanitaire en logement en juillet 2016[1], des valeurs opposables existent pour le résidentiel collectif. Mais qu’en est-il en tertiaire ? Pour tenter de répondre à cette question, GRDF a missionné le Costic pour clarifier le réel besoin d’ECS sur tous les segments qui composent le tertiaire.

Cet article vise à faire le point pour les établissements de santé.

Analyse de la littérature

Parmi les 12 valeurs recensées pour les maisons de retraite et les 38 valeurs pour les hôpitaux (hors restauration et blanchisserie), les plus souvent rencontrées pour le besoin journalier à 40°C sont les suivantes :

  • 65 litres par lit et par jour pour les maisons de retraite
  • 80 à 100 litres par lit et par jour pour les hôpitaux

Pourtant, d’une source à l’autre, la variabilité des besoins ECS est forte. Exemple ici pour les maisons de retraite.

 

Besoins d’ECS journaliers en maison de retraite

Source

Usage

Besoin ECS à 60°C

Besoin ECS à 40°C

Campagne de mesure EDF de 1985 [2]

Guide sectoriel de l’AICVF de 1993 [3]

Par chambre

40 litres par lit et par jour

65 litres par lit et par jour

Pour la cuisine (hors lave-vaisselle)

3 à 5 litres par repas

5 à 8 litres par repas

Pour la cuisine (avec lave-vaisselle)

9 à 10 litres par repas

15 à 17 litres par repas

EDF 1986 [4]

Qualita 1996 [5]

AICVF 1991 [6]

Cegibat 1983 [7]

Par chambre

40 litres par lit et par jour

65 litres par lit et par jour

Par repas

10 litres par repas

17 litres par repas

AO Smith 1985 [8]

Par personne

30 à 60 litres par personne et par jour

50 à 100 litres par personne et par jour

Calculs pratiques de plomberie sanitaire 1994 [9]

Par personne hors restauration et buanderie

40 litres par personne et par jour

65 litres par personne et par jour

Calculs pratiques de plomberie sanitaire 2008 [10]

Par personne hors restauration et buanderie (2 douches par semaine)

80 litres par personne et par jour

135 litres par personne et par jour

Mode de calcul des installation d’ECS 2003 [11] et 2011 [12]

Par lit (lavabos + douches)

40 litres par lit et par jour

65 litres par lit et par jour

Méthode de calcul th-BCE 2012 – RT2012 [13]

Par lit

50 litres par lit et par jour

85 litres par lit et par jour

SOCOL 2014 [14]

Par lit

15 litres par lit et par jour

25 litres par lit et par jour

 

A noter que :

  • Certaines de ces valeurs sont données pour permettre le dimensionnement des systèmes de production. Ce sont donc des valeurs considérées comme des maximums et non comme le besoin moyen journalier de ce type d’établissement.
  • D’autres sources ne précisent pas si les usages buanderie et restauration sont pris en compte ou non dans la valeur indiquée.

Enfin, des valeurs plus extrêmes existent. Dans son catalogue spécifique à ce type d’établissement le fabricant de robinetterie Delabie souligne par exemple que les résidents d’un établissement de santé font principalement leur toilette au lavabo étant donné leur perte d’autonomie (personnes affaiblies, âgées, invalides ou ayant subi une intervention chirurgicale). Comme la toilette au lavabo prend plus de temps que la toilette à la douche : 14 à 20 minutes pour une toilette au lavabo contre 8 à 10 minutes en moyenne pour une douche, les consommations journalières par lit en sont donc fortement impactées. Le choix de la robinetterie devient alors dimensionnant, exemple :

 

Besoins d’ECS estimé suivant la nature de la robinetterie sélectionnée

(1) Le mitigeur est supposé laissé ouvert pendant toute la période de la toilette.

Usage

Appareil

Besoins

Source

Toilette au lavabo dans les établissements de santé et les résidences pour personnes âgées.

Mitigeur avec un débit limité à 5 litres/min

100 litres d’eau mitigée par jour et par lit (1)

5 litres/min d’eau mitigée

20 minutes de soutirage

Catalogue robinetterie pour établissements de santé et maison de retraite, catalogue Delabie 2016.

Mitigeur avec détection électronique et un débit limité à 3 litres/min

22 litres d’eau mitigée par jour et par lit (1)

3 litres/min d’eau mitigée

7,5 minutes de soutirage

 

L’analyse de la bibliographie existante a donc mis en évidence une grande variabilité des données disponible pour le bureau d’études pour concevoir son installation. A noter également que les données sur la pointe dix minutes, souvent dimensionnante pour les installations avec faible volume de stockage sont quasi inexistantes.

Analyse des consommations réelles : sites avec relevés ou avec télésuivi

Pour affiner ce premier travail, le Costic a pu recueillir des relevés de consommation pour 77 maisons de retraite et 24 hôpitaux.

Il disposait également des données de 14 sites télésuivis :

  • Un EHPAD à Orléans (Ehpad + cuisine et buanderie). Télésuivi réalisé pour le compte de GRDF au pas de temps une minute.
  • Un hôpital dans les Hauts-de-Seine. Télésuivi réalisé pour le compte de GRDF au pas de temps une minute.
  • 5 EHPAD, 4 hôpitaux et 3 maisons spécialisées de santé. Télésuivi par le bureau d’étude TECSOL au pas de temps 10 minutes.

L’analyse de ces données donne plus de renseignements sur les profils horaire, journalier, hebdomadaire et mensuel des établissements de santé.

Profils horaires moyens

Dans un EHPAD, tous les jours de la semaine sont identiques et on distingue 3 pics de puisage :

  • 1er pic le matin vers 8h-10h lié aux soins d’hygiène corporelle et à la préparation des repas. En général, c’est cette pointe qui prédomine sur les deux autres.
  • 2nd pic vers 13h lié au lavage de la vaisselle. Cependant, ce pic n’est visible que pour les établissements où les lave-vaisselles sont alimentés en ECS. S’ils sont alimentés en eau froide sanitaire, ce 2nd pic est inexistant.
  • 3ème pic le soir vers 18-19h lié au lavage de la vaisselle et aux soins corporels.

Durant la nuit, entre 21h et 6h du matin, il n’y a généralement aucun soutirage contrairement à ce que l’on observe en habitat collectif.

Exemple de profil horaire moyen des besoins à 40°C obtenu pour un EHPAD dans l’Hérault (à gauche) et un EHPAD dans le Loiret (à droite), tous deux avec une cuisine et une buanderie
Exemple de profil horaire moyen des besoins à 40°C obtenu pour un EHPAD dans l’Hérault (à gauche) et un EHPAD dans le Loiret (à droite)

Profils hebdomadaires moyens

Comme on pouvait s’en douter, on observe très souvent une diminution des consommations d’eau chaude sanitaire les weekends. Cette diminution est sans doute causée par un plus faible nombre de douche comme l’effectif soignant est réduit.

Exemple de profil journalier moyen des besoins à 40°C obtenu pour un EHPAD dans l’Hérault (à gauche) et un EHPAD dans le Loiret (à droite), tous deux avec une cuisine et une buanderie
Exemple de profil journalier moyen des besoins à 40°C obtenu pour un EHPAD dans l’Hérault (à gauche) et un EHPAD dans le Loiret (à droite)

Profils mensuels

On observe une légère variation des besoins ECS à 40°C au fil des mois en EHPAD. Celle-ci est cependant plus faible que celle observée sur les autres bâtiments de santé.

Les fluctuations observées sont probablement liées aux variations du nombre de résidents. Mais ce nombre varie moins que dans d’autres types de bâtiment. Dans certains établissements, les besoins sont plus faibles en juillet et en août. Le nombre de douches doit en effet être restreint compte tenu de l’effectif de personnel soignant plus faible.

Profils mensuels des besoins d’eau chaude sanitaire à 40°C obtenus pour les différents EHPAD
Profils mensuels des besoins d’eau chaude sanitaire à 40°C obtenus pour les différents EHPAD

Pointe 10 minutes

Dans les cinq EHPAD instrumentés, les besoins de pointe 10 minutes sont inférieurs à 8 litres d’ECS à 40°C par lit. Cette valeur est bien inférieure à celle rencontrée en logement collectif comme l’illustre la courbe ci-dessous :

Comparaison des pointes 10 minutes en EHPAD et en logement collectif

Ces pointes sont cependant importantes et peuvent représenter jusqu’à 20% des besoins moyens journaliers d’un EHPAD.

Pointes de 10 minutes dans les établissements de santé exprimées en pourcentage des besoins moyens journaliers
Pointes de 10 minutes dans les établissements de santé exprimées en pourcentage des besoins moyens journaliers

Enfin, l’heure de ces pointes est très variable d’un établissement à l’autre :

  • 9h : heure des soins dans un EHPAD sans restauration
  • 11h50, 13h30 heure de cuisine ou éventuellement de buanderie dans d’autres EHPAD avec restaurant
  • 15h30 (chasse du ballon de stockage ?), 8h40 (soins corporels ?), 12h30 (besoin de cuisine ?) dans les trois hôpitaux
  • 7h50, 8h et 18h30 dans les foyers

Pointe sur deux heures

Le constat fait sur la pointe de dix minutes est exactement le même si on s’intéresse cette fois à la pointe sur deux heures : valeurs proches de l’habitat collectif, Backeroot hôpital pas justifié.

Débits de pointe sur deux heures en établissement de santé
Débits de pointe sur deux heures en établissement de santé

Besoin moyen journalier

Les besoins journaliers moyens sur une année, observés dans 65 EHPAD sont compris entre 10 et 95 litres à 40°C par lit. Ils varient selon les usages de l’ECS présents dans l’établissement.

  • 10 à 20 litres à 40°C par jour et par lit pour un EHPAD sans lingerie et sans cuisine
  • 40 à 95 litres à 40°C par jour et par lit pour un EHPAD possédant une cuisine préparant les repas sur place, des machines de lavage de vaisselle alimentées en ECS et une lingerie avec des laveuses essoreuses raccordées en ECS aussi.

La cuisine avec préparation des repas sur place et le lavage de la vaisselle est l’usage le plus consommateur.

Besoins d’ECS moyens journaliers à 40°C dans les EHPAD et les EHPA issus des relevés manuels et des télésuivis
Besoins d’ECS moyens journaliers à 40°C dans les EHPAD et les EHPA issus des relevés manuels et des télésuivis

Cette valeur dépend des soins d’hygiène corporelle apportés qui sont variables selon les EHPAD (deux douches par semaine, une douche toutes les deux semaines, …) mais pas seulement. Elle dépend également de la présence ou non d’autres usages de l’eau chaude :

  • La cuisine qui peut également desservir d’autres bâtiments (école, hôpital, …) ou être seulement en liaison froide
  • La buanderie (le linge plat étant souvent externalisé)

La décomposition des consommations de l’EHPAD d’Orléans montre également l’importance de la cuisine. Pour le jour représenté ci-dessous (journée moyenne de la période de suivi), la cuisine constituait 60% des besoins de l’EHPAD et influait fortement les pointes horaires.

La buanderie (14% des consommation ce jour là) vient elle aussi augmenter la pointe de 13h. la buanderie correspond à des séquences courtes de soutirage (1 à 3 minutes) mais à des débits très élevés (max : 78 litres par minutes à 40°C sur la période de suivi).

Exemple de décomposition des besoins d’ECS de l’EHPAD d’Orléans
Exemple de décomposition des besoins d’ECS de l’EHPAD d’Orléans

Pour illustrer encore le poids des postes cuisine et lingerie dans les consommations d’un EHPAD nous pourrions citer ces trois valeurs de besoin journalier moyen :

  • 16 litres/lit pour un EHPAD sans cuisine et sans lingerie, équipé de limiteurs de débit,
  • 70 litres/lit pour un autre EHPAD avec une cuisine desservant seulement cet établissement et une laverie assurant le service pour tout le linge exceptés les draps. Les machines pour le lavage de la vaisselle et du linge étant alimentées en ECS.
  • 50 litres/lit pour un autre EHPAD avec une cuisine desservant seulement cet établissement et une laverie assurant le service pour tout le linge exceptés les draps. Seules les machines pour le lavage du linge sont alimentées en ECS

Enfin on note également une assez faible disparité du besoin moyen journalier dans un EHPAD autour de sa valeur moyenne. Tous les jours se ressemble en quelque sorte dans un EHPAD comme l’illustre la figure ci-dessous.

Conclusion

Cette étude a permis d’améliorer la connaissance du besoin ECS sur le secteur de la santé mais a également mis en évidence une forte disparité d’un établissement à l’autre.

La présence ou non d’une cuisine, préparant ou non les repas sur place, la présence d’une laverie, l’alimentation des appareils en ECS ou simplement en eau froide, font en effet grandement varier les besoins.

Seul un questionnement fin du MOA pourra donc bien orienter le bureau d’études dans la conception de son installation.

 

Bibliographie


[1] Guide technique : les besoins d’eau chaude sanitaire en habitat individuel et collectif – Ademe – Juillet 2016

[2] Synthèses des expérimentations en eau chaude sanitaire dans le tertiaire – EDF DER/ADE – 1995

[3] Santé, programmer, concevoir, gérer les bâtiments à hautes performances énergétiques – collection des guides sectoriels de l’Ademe et de l’AICVF – Première édition – PYC Edition - 1993

[4] L’eau chaude électrique, 1985 : résidentiel et tertiaire – EDF – 1986

[5] Comment valoriser l’eau chaude sanitaire dans les locaux tertiaire – Qualita – EDF - 1996

[6] Guide de l’eau chaude sanitaire dans les bâtiments résidentiels et tertiaires, conception et calcul des installations – Collection des guides de l’AICVF – première édition – PYC Editions – 1991

[7] Comment évaluer rapidement les besoins en eau chaude sanitaire dans les logements et le secteur tertiaire ? – Cegibat relations – juin 1983

[8] Catalogue AO Smith – 1985

[9] Calculs pratiques de plomberie sanitaire – Editions Parisiennes – février 1994

[10] Calculs pratiques de plomberie sanitaire – Editions Parisiennes – décembre 2008

[11] Georges Baeckeroot – les installations d’ECS, mode de calcul – Editions parisiennes – 2003

[12] Georges Baeckeroot – les installations d’ECS, mode de calcul – Editions parisiennes – 2ème édition – 2011

[13] CSTB – Méthode de calcul Th-BCE 2012 – annexe de l’arrêté du 20 juillet 2011

[14] ENERPLAN – Ratios des besoins en eau chaude sanitaire pour le dimensionnement des installations en solaire thermique collectif – SOCOL – Juin 2014

MA NOTE