Carte d'identité
Situé dans le pays de Gex, en lisière de la frontière franco-suisse, le lycée international de Ferney-Voltaire faisait depuis plus de 10 ans l’objet d’une réflexion quant à son possible agrandissement. « Les effectifs ne cessant de croître, il a été décidé dès 2004 de construire une extension pour l’accueil de 880 nouveaux élèves, indique Véronique Richalet, Directrice de projet innovation et performance au conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes.
Le site étant trop contraint, la décision a été prise de créer une extension sur la commune de Saint-Genis-Pouilly distante de 7 km. Ce nouveau site a bénéficié d’un projet ambitieux d’aménagement et sera desservi à terme par la voie de tramway depuis Genève. Il permettait d’envisager la construction d’un bâtiment à forte valeur environnementale, en accord avec la volonté d’exemplarité de la Région. » À proprement parler, il s’agit donc d’un site annexe plutôt que d’une extension du lycée existant.
Lors de la conception du projet en 2010, le nouveau lycée devait se conformer au futur référentiel du bâtiment à énergie positive (Bepos). A minima, l’objectif était de concevoir un bâtiment plus performant que le standard en vigueur. « Le programme de l’opération rédigé en 2010 prévoyait la construction d’un bâtiment respectant le label BBC (RT 2005) et le standard passif (soit un besoin en chauffage inférieur à 15 kWh/m².an) avec une possibilité d’évolution en bâtiment à énergie positive », complète Véronique Richalet. Une évolution qui sera possible en augmentant la puissance installée de panneaux photovoltaïques qui est à ce jour de 770 m2 pour une puissance de 120 kWc.
Réduction des ponts thermiques
Le principe de base présidant à un projet de bâtiment visant le niveau Bepos consiste à travailler sur son enveloppe, qui doit être à la fois compacte, étanche à l’air et dotée d’une isolation thermique performante. Le parti pris de l’architecte du projet était de remplir ces conditions tout en inscrivant le futur lycée de manière harmonieuse dans son environnement immédiat.
Le bâtiment a été conçu à la manière d’un cloître cistercien, adoptant de fait une configuration rectangulaire, ménageant une cour intérieure circonscrite par un péristyle. L’intégralité des façades (béton) a fait l’objet d’une isolation thermique par l’extérieur (ITE), avec des bardages différenciés : en pierre agrafée côté rue, en bois côté cour. Ces éléments de bardage auraient pu dégrader la performance thermique de l’enveloppe en générant
des ponts thermiques au niveau de leurs pattes d’accrochage, mais l’équipe de maîtrise d’oeuvre, qui avait identifié ce risque, est parvenue à le minimiser. « L’entreprise chargée de la pose du bardage extérieur a trouvé la solution pour atteindre l’objectif de performance que nous avions fixé, indique Magali Laneselli, chargée d’affaires au sein du bureau d’études Étamine, en ajoutant une plaque d’isolant rigide de quelques centimètres entre l’équerre de fixation des éléments de bardage et les parois. Sans ce traitement, le coefficient Ubat du projet aurait atteint 0,22, tandis qu’avec cette solution, il a été ramené à 0,17 ».
L’étanchéité à l’air de l’enveloppe a également été soignée, puisque dans certaines classes, le taux de perméabilité à l’air mesuré à la livraison du lycée est de 0,4 m3/h.m2 (un résultat bien meilleur à ce qui est prescrit en RT 2012). Enfin, les façades ont fait l’objet d’un traitement étudié quant à la gestion des apports solaires : entre 30 et 40 % de leur surface cumulée est vitrée, de façon à bénéficier au mieux des apports thermiques et lumineux naturels (l’éclairage est d’ailleurs en partie modulé selon le degré de luminosité naturelle). La quasi-totalité des menuiseries (bois) est équipée de brise-soleil orientables motorisés donnant sur l’extérieur, à l’exception du rez-dechaussée (l’édifice est en R+2).
2 systèmes indépendants pour le chauffage et l'ECS
Le choix du gaz naturel comme énergie primaire pour assurer les besoins de chauffage dans la limite des 15 kWh/m2.an à coût maîtrisé s’est imposé très en amont, dès la phase d’avant-projet détaillé. « En considérant la totalité du volume chauffé, le projet se positionnait en limite basse pour justifier le recours à une chaufferie bois, détaille Sébastien Randle, chargé d’affaires au sein du bureau d’études Étamine. Il aurait fallu que les besoins en énergie du projet, établis à quelque 175 MWh/an en phase amont, soient plus élevés pour qu’une solution de chauffage au bois soit compétitive par rapport à une solution gaz.
De plus, cette dernière répondait à la volonté du maître d’ouvrage de disposer d’une solution relativement simple et fonctionnant à faible coût ». Outre la chaufferie bois, une solution recourant à une PAC sur nappe phréatique avait aussi été envisagée. « Mais au jeu des comparatifs en phase d’avant-projet sommaire, cette solution s’est avérée dix fois plus élevée en montant d’investissement que la solution gaz… », poursuit-il. Les productions de chauffage et d’ECS sont assurées de manière indépendante de façon à ne pas avoir à réaliser de bouclage ECS. Pour l’eau chaude nécessaire aux cuisines du réfectoire, un chauffe-eau gaz de 47 kW a été préconisé, tandis que dans chaque bloc sanitaire, l’ECS est produite par des cumulus électriques.
La chaufferie gaz est équipée de 2 chaudières à condensation cascadées de 280 kW chacune, censées fonctionner au maximum à 60 % de leur charge. Ces chaudières alimentent plusieurs sous-stations, chacune dévolue à un tronçon (ou « aile ») du bâtiment : « Nous avons estimé plus commode de prévoir des sous-stations alimentées par une seule et même boucle d’eau afin de limiter les pertes sur le réseau, argumente Sébastien Randle. L’intérêt d’une boucle d’eau unique étant de limiter le tirage de canalisations : ainsi les départs chauffage pour les émetteurs et centrales de traitement d’air se font à partir de ces sous-stations et non depuis la chaufferie ».
Plafonds rayonnants dans les classes
Au total, le site accueille 11 centrales de traitement d’air (CTA), dont les débits nominaux sont compris entre 1 000 m3/h et 15 000 m3/h, toutes à récupération d’énergie sur l’air extrait. Pour la préparation de l’air neuf, le débit au sein des batteries chaudes est modulé en fonction de la température de l’air repris. La température de consigne dans l’ensemble des locaux est de 20 °C.
Dans les salles de classe, les plafonds rayonnants ont été préférés aux traditionnels radiateurs, mais aussi aux planchers chauffants : « Nous avons préféré éviter les planchers chauffants dans les salles de classe car les chapes présentent trop d’inertie thermique, souligne Sébastien Randle. Tandis que les plafonds rayonnants offrent une température à la fois homogène et confortable. Quant aux radiateurs, ils auraient occulté les surfaces vitrées en leur partie inférieure. ». Installés en plénum, ces plafonds rayonnants sur support métallique occupent le quart de la surface des plafonds de chaque salle de classe.
Le maintien de la température de consigne dans chaque salle de classe est assuré par une régulation à deux niveaux : une régulation primaire ajuste la température en départ de chaque sous-station, tandis qu’une régulation secondaire, asservie à une sonde de température dans chaque classe, module les débits au sein des plafonds rayonnants en agissant sur le degré d’ouverture de leurs vannes. Le fonctionnement de l’ensemble des équipements CVC est suivi au moyen d’une gestion technique centralisée (GTC).
Les caractéristiques intrinsèques de l’enveloppe (son niveau d’isolation), combinées à la gestion des ouvrants et de leurs occultations, sont censées garantir à elles seules le confort d’été par simple ventilation naturelle, sans prévoir des équipements ou actions dédiés (climatisation, rafraîchissement nocturne). Par ailleurs, l’établissement n’étant ouvert que pendant l’année scolaire et fermé en période estivale, la question du confort d’été est moins prégnante que dans d’autres établissements.
Le lycée à l’aune de l’expérimentation E+C