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Réalisation

La transition exemplaire d’un immeuble de bureaux en résidence étudiante

Mis à jour le
5/5 (2 avis)

Dans le cadre d'un programme de rénovation au cœur de Toulouse, un ancien bâtiment de bureaux a été transformé en résidence étudiante. Une restructuration lourde, entourée d’une démarche de recyclage et de réutilisation. Afin de maîtriser les charges des étudiants, le bâtiment et la chaufferie gaz ont été intégralement rénovés.

Carte d'identité

Date des travaux :
Septembre 2017 à septembre 2019
Localité :
Toulouse
Type de bâtiment :
153 logements
Superficie :
5700 m2
Maître d'ouvrage : Groupe des Chalets
Architecte : Agence Letellier
Bureau de contrôle : Veritas
Consommations observées : 61 kWhep/m2.an

Transformer un bâtiment de bureaux construit dans les années 1970 en résidence étudiante, tel fut le projet initié par le Groupe des Chalets, référent de l'habitat social en région Occitanie. L'opportunité s’est présentée en décembre 2015, lorsqu’il a fait l’acquisition de l'immeuble, qui appartenait alors à la Mutualité Sociale Agricole Midi-Pyrénées Sud et à la Chambre d'agriculture. « Il fallait un acquéreur aux épaules solides car le prix d'acquisition était élevé, se souvient Hélène Aubineau, Responsable Conception technique et Achats au sein du GIE. Le bâtiment était vraiment très bien situé, dans un quartier résidentiel en bord du canal de la Brienne, en plein centre de Toulouse, où les terrains constructibles ne sont pas légion… »

UNE TRANSFORMATION RADICALE

Mais quitte à rénover le bâtiment pour lui donner une autre destination, pourquoi le Groupe des Chalets a-t-il opté pour la création d’une résidence étudiante plutôt que des logements classiques ? La configuration originelle du bâtiment a exercé une grande influence sur sa destination future. « Ce bâtiment de bureaux sur neuf étages disposait de plateaux carrés, avec, en son centre, un noyau abritant les cages d’escaliers et les ascenseurs, explique Hélène Aubineau. Il est vite apparu en phase d’études qu’il serait plus réaliste de créer des logements de surface réduite autour de ce noyau central. Ce qui a donné lieu au projet d’une résidence étudiante de 153 logements. » Les étudiants y ont fait leur première rentrée en septembre 2019.

Fidèle à sa philosophie, le Groupe des Chalets s’est astreint à une démarche vertueuse en matière d’économie circulaire, en valorisant le maximum de matériaux de l'ouvrage existant. « Nous n'avons pas pu valoriser les déchets de chantier, mais nous nous sommes efforcés de les limiter, en faisant le choix de l'acquisition-amélioration – et donc évitant la démolition de la tour – plutôt que de la construction neuve, souligne Hélène Aubineau. Si nous n'étions pas partis sur de l'acquisition-amélioration, nous n'aurions pas pu construire un ouvrage de cette envergure. » Le GIE a également entrepris un important programme de récupération et de réemploi de mobilier disponible (voir témoignage).

Pour les parties communes, le parti pris  est de mixer le côté brut du béton avec  des couleurs vives
Pour les parties communes, le parti pris est de mixer le côté brut du béton avec des couleurs vives
     À l'issue de leur déménagement, la MSA et la Chambre d'agriculture ont laissé beaucoup de mobilier (chaises, placards, étagères...). Nous avons alors envisagé d'en réutiliser le maximum, plutôt que de les mettre au rebut. D'autant plus que jouer sur le réemploi de mobilier ancien allait dans le sens de la démarche de l'agence d’architecture Letellier : elle souhaitait conserver le côté brut de la résidence. Nous nous sommes rapprochés de la SCOP toulousaine Merci René, entreprise de l’économie sociale et solidaire dont nous partageons des valeurs communes, qui s’est mise en relation avec son réseau de professionnels du mobilier de seconde vie. Nous avons également utilisé des palettes en bois pour en faire des porte-valise au-dessus des portes d'entrée... Autant d'initiatives qui participent d'une économie circulaire, favorisant du même coup l'emploi local.
Helene AUBINEAU
Responsable conception technique et achats au sein du GIE
     C’est un bâtiment qui a une histoire et une architecture typique des années 70, avec une présence très marquée dans le quartier (entouré par des habitations en R+1). Outre le travail portant sur les façades, notre parti pris architectural côté intérieur a été de conserver au maximum la structure apparente (poteaux et murs en béton brut de belle qualité), afin de témoigner de ce patrimoine et de le valoriser. De même, au sein des logements, les réseaux (chauffage, luminaires) ont été laissés apparents. Cette logique visant à mettre en valeur l'existant a été poussée jusqu'au bout, en optant pour du mobilier de récupération. Pour les parties communes, toutefois, nous avons décidé de masquer ponctuellement ces réseaux (cheminements de câbles et distribution de chauffage) en faux plafonds, pour des raisons de pérennité et de sécurité, tout en maximisant les surfaces en béton brut apparent.
Clément Lourmière
Letellier Architectes
     Cette résidence constitue, à mon sens, un chantier emblématique de nouvelles pratiques constructives : des logements étudiants ont pu être réalisés à partir de bureaux existants. Je trouve cette opération pertinente à plus d’un titre. Tout d'abord, cette initiative est une réponse au problème de l’étalement urbain, puisque de nouveaux logements sont construits à partir d'une structure existante. Ensuite, ce type d'opération recèle des vertus environnementales, dans la mesure où il limite les émissions de GES liées à la destruction-reconstruction du bâti. Enfin, d'un point de vue énergétique, la rénovation de la chaufferie au gaz naturel permet de répondre aux besoins de chauffage et d'ECS des étudiants.
Ahcene Bensedira
ingénieur d’affaires, GRDF
meubles de récupération
Les 153 logements étudiants sont pourvus de meubles de récupération (tables, chaises...) et de matelas 100 % recyclés
circuits de distribution du chauffage
Le parti pris du cabinet d'architectes Letellier était de laisser apparents les circuits de distribution du chauffage, afin de donner aux logements un côté « loft »
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UN OBJECTIF AMBITIEUX DE PERFORMANCE ÉNERGÉTIQUE

Afin qu’ils répondent aux besoins des bâtiments d’habitation contemporains (isolation thermique, sécurité incendie, acoustique), tous les plateaux (sur neuf niveaux) ont été remis à nu. Les anciennes cloisons ont été déposées. La façade a été remplacée et isolée par plusieurs couches d’isolant thermique (laine de roche). « Nous avons ainsi souhaité conserver la superstructure du bâtiment. Au niveau des façades, nous avons retravaillé le volume existant pour pouvoir l'insérer plus facilement dans le quartier, en recourant à un mode constructif à base de murs-rideaux, indique Clément Lourmière, architecte au sein du cabinet Letellier. Ce qui a induit de notre part un travail particulier, car les murs-rideaux sont plus dévolus à des bâtiments de bureaux. Il a fallu se conformer aux réglementations (sécurité incendie, acoustique) inhérentes aux bâtiments d'habitation. Le traitement des façades au moyen d'un bardage zinc et de surfaces vitrées, avec un jeu d’ondulations au niveau des lames de bardage verticales (qui jouent également le rôle d'occultations solaires), se veut un clin d’œil à la fois aux reflets à la surface du canal de Brienne et au flux de véhicules sur l’avenue de Brienne. »

En matière de performance énergétique, si l’objectif était d’aboutir à un bâtiment économe, le bureau d’études Math Ingénierie est parti d’une feuille blanche : « Dans la mesure où il s’agissait d’une rénovation entraînant un changement d’affectation, nous n’avions pas de référence en matière de classe énergétique sur l’existant pour de l’habitat, indique Jérôme Duhamel, Chef de projet pour Math Ingénierie. L’état des lieux correspondait à l’usage originel du bâtiment. Pour autant, nous avons visé un objectif de performance énergétique ambitieux. Sur la base de nos choix techniques, nos calculs thermiques [prenant en compte les améliorations thermiques en façade, en toiture, etc.] aboutissent à une consommation de 61 kWhep/m2.an sur ce bâtiment (classe B). Ce qui est très bon, dans la mesure où un programme BBC-Rénovation dans notre région se situerait autour de 72 kWhep/ m2.an ». La maîtrise d'ouvrage n'avait pas fait le choix de viser un label : rechercher la performance n’implique pas nécessairement l’affichage de cette performance !

Les choix techniques du BE se sont rapidement imposés, comme le confirme Hélène Aubineau : « Dans la mesure où le bâtiment était déjà raccordé au réseau de distribution de gaz, et eu égard au nombre de logements à alimenter en chauffage et en ECS, la chaufferie collective représentait l’option la plus indiquée. Nous n'avons donc pas hésité longtemps. » De plus, une solution en chaufferie collective permet de maîtriser le montant des charges et ainsi de respecter les budgets limités des étudiants. L’émission de chaleur dans les logements étudiants se fait via des radiateurs en acier moyenne température munis de robinets thermostatiques avec une variation temporelle performante, permettant un ajustement rapide de la température ambiante.

     En plus de l'édition des baux, de l'organisation des visites, des états des lieux (entrée, sortie), mon rôle est d'assurer l'intendance au quotidien, afin de faire le lien entre les résidents et le Groupe les Chalets, ainsi qu'avec les intervenants techniques... Nous accueillons régulièrement des résidents qui font pour la première fois l'expérience d'une installation tout seuls. Il convient donc de les rassurer, de même que leurs parents ! Dans la grande majorité des cas, les résidents font état d'une vraie satisfaction quant à notre prestation, à leur arrivée comme à leur départ. Certains anciens résidents souhaitent même revenir ! La maintenance des installations de chauffage et de ventilation est confiée à un prestataire (Idex). Nous mettons à la disposition des résidents un numéro de téléphone leur permettant de contacter directement Idex, qui assure un service d’astreinte dédié à tout problème de maintenance.
Ryad Hermouche
gérant de la résidence l’Annexe
     La chaufferie étant au niveau R-3, les deux chaudières affichent une pression de service supérieure à 6 bars, afin que le fluide puisse remonter les douze niveaux (les trois niveaux de sous-sol + les neuf niveaux du bâtiment). Le nouveau conduit de fumée – qui emprunte l'emplacement d'origine – est visitable sur toute sa hauteur (une obligation réglementaire pour les chaufferies de puissance installée supérieure à 300 kW). Conserver tous les cheminements d'origine (pour le conduit de fumées, les gaines techniques, etc.) est d'ailleurs l'un des défis que nous avons dû relever. Il a fallu effectuer des réservations dans les dalles, pour y faire passer les réseaux (bouches de soufflage, évacuations, distribution eau froide/eau chaude et radiateurs, etc.), ce qui a requis des études de structure préalables, afin de prémunir les dalles contre tout risque d'effondrement. L'architecte a souhaité que le bâtiment conserve son aspect brut, avec des cheminements de câbles apparents. Nous avons donc opté pour des distributions verticales, de manière à conserver le maximum de hauteur sous plafond (d'au moins 2,50 m), tout en masquant au maximum les réseaux. Nous avons donc optimisé le positionnement des radiateurs à cette fin.
Jérôme Duhamel
Math Ingénierie
Deux chaudières de 225 kW
Les deux chaudières de 225 kW chacune fonctionnent en cascade pour la production de chauffage et d'ECS

UNE CHAUFFERIE COLLECTIVE GAZ RÉNOVÉE EN PROFONDEUR

Le changement de destination du bâtiment a imposé de repenser totalement les équipements de la chaufferie. Les deux chaudières gaz d’environ 500 kW chacune dataient de la construction du bâtiment. Les trois groupes de production de froid dévolus à la climatisation devenaient obsolètes puisqu'il n'était pas question de climatiser les futurs logements, pour des raisons de coûts et de performance énergétique. La production d'ECS compatible avec les besoins des 153 logements (majoritairement des T1 mais quelques T2 et T3 en colocation) équipés de sanitaires et d’un coin cuisine devenait centrale dans la conception. Une solution basée sur une chaufferie gaz collective se révélait ainsi d’autant plus pertinente.

Math Ingénierie a préconisé l’installation de deux chaudières gaz à condensation haut rendement (2 x 225 kW) à trois piquages, dont une en appoint secours. Ces deux chaudières en cascade ont été dimensionnées pour fonctionner 70 % du temps tout au long de l'année. Seules, elles fonctionnent alternativement une semaine sur deux et, dans les périodes les plus froides, la régulation intégrée active les deux chaudières afin qu’elles respectent les températures de consigne, selon une loi d’eau indexée sur la température extérieure.

Ces deux chaudières présentent trois piquages leur permettant d’avoir deux circuits retours : des circuits moyennes températures, inférieures à 40 °C, et un circuit haute température, uniquement pour l’eau chaude sanitaire, de l’ordre de 60 °C, avec un départ commun. Les réseaux moyennes températures correspondent au réseau alimentant les radiateurs des logements, d’une part, et au réseau alimentant les batteries chaudes des CTA, dévolues à la préparation de l’air neuf dans un certain nombre de logements et d'espaces communs, d’autre part (voir encadré). « Les régimes de température en retour (des radiateurs, des batteries chaudes des CTA) étant inférieurs à 50 °C, cela permet aux chaudières de condenser une grande partie de l'année », précise Jérôme Duhamel.

Du double flux pour un tiers des logements

Afin de préserver les occupants des 54 logements donnant sur l'avenue de Brienne du bruit environnant, un système double-flux a été préféré à un système de VMC, impliquant des entrées d'air au niveau des menuiseries du mur-rideau. Dans ces 54 logements, l'air neuf est prétraité au niveau de la CTA dédiée (5 200 m3/h) et insufflé via des bouches murales dans les pièces de vie et les chambres. Les autres logements sont équipés de VMC hygro B. Une autre CTA (1 000 m3/h) est dédiée au renouvellement d'air salles de réunion, bureaux et salles de vie (dédiées notamment au travail de groupe). Ces deux centrales sont remisées dans les locaux techniques du dernier étage, ainsi que l'extracteur de VMC. Les chaudières ont donc également pour charge de produire de l'eau chaude nécessaire à la préparation de l'air neuf des logements donnant sur l'avenue de Brienne et des communs. Un circuit de chauffage dédié alimente les batteries chaudes des CTA

PRODUCTION D'ECS COLLECTIVE EN INSTANTANÉ

Les chaudières présentant de faibles pertes de charge ont été associées à un collecteur « départ » commun à tous les réseaux, un collecteur « retour » moyenne température (radiateurs logements, et batteries chaudes des CTA) et un collecteur haute température (correspondant au réseau ECS), et non à des bouteilles de découplage. La production d’ECS se fait en instantané, via un échangeur à plaques de 420 kW. « Afin de pouvoir fonctionner sur une seule chaudière pour la production d’ECS, nous avons prévu un réservoir de stockage primaire de 2 000 litres, en amont de l'échangeur. La température de consigne de stockage est de 80 °C », ajoute Jérôme Duhamel. Sur le circuit secondaire ECS, le départ se fait à 60 °C et le retour à 55 °C. Un passage du retour ECS via l'échangeur au-dessus de 50 °C prémunit l'installation contre les problématiques liées à légionellose.

Circuits moyenne température (40 °C) et circuit haute température (60 °C)
Les chaudières alimentent plusieurs circuits moyenne température (40 °C) pour les radiateurs et les batteries chaudes des CTA, ainsi qu'un circuit haute température (60 °C) pour la production d'ECS
MA NOTE