Carte d'identité
Transformer un bâtiment de bureaux construit dans les années 1970 en résidence étudiante, tel fut le projet initié par le Groupe des Chalets, référent de l'habitat social en région Occitanie. L'opportunité s’est présentée en décembre 2015, lorsqu’il a fait l’acquisition de l'immeuble, qui appartenait alors à la Mutualité Sociale Agricole Midi-Pyrénées Sud et à la Chambre d'agriculture. « Il fallait un acquéreur aux épaules solides car le prix d'acquisition était élevé, se souvient Hélène Aubineau, Responsable Conception technique et Achats au sein du GIE. Le bâtiment était vraiment très bien situé, dans un quartier résidentiel en bord du canal de la Brienne, en plein centre de Toulouse, où les terrains constructibles ne sont pas légion… »
UNE TRANSFORMATION RADICALE
Mais quitte à rénover le bâtiment pour lui donner une autre destination, pourquoi le Groupe des Chalets a-t-il opté pour la création d’une résidence étudiante plutôt que des logements classiques ? La configuration originelle du bâtiment a exercé une grande influence sur sa destination future. « Ce bâtiment de bureaux sur neuf étages disposait de plateaux carrés, avec, en son centre, un noyau abritant les cages d’escaliers et les ascenseurs, explique Hélène Aubineau. Il est vite apparu en phase d’études qu’il serait plus réaliste de créer des logements de surface réduite autour de ce noyau central. Ce qui a donné lieu au projet d’une résidence étudiante de 153 logements. » Les étudiants y ont fait leur première rentrée en septembre 2019.
Fidèle à sa philosophie, le Groupe des Chalets s’est astreint à une démarche vertueuse en matière d’économie circulaire, en valorisant le maximum de matériaux de l'ouvrage existant. « Nous n'avons pas pu valoriser les déchets de chantier, mais nous nous sommes efforcés de les limiter, en faisant le choix de l'acquisition-amélioration – et donc évitant la démolition de la tour – plutôt que de la construction neuve, souligne Hélène Aubineau. Si nous n'étions pas partis sur de l'acquisition-amélioration, nous n'aurions pas pu construire un ouvrage de cette envergure. » Le GIE a également entrepris un important programme de récupération et de réemploi de mobilier disponible (voir témoignage).
UN OBJECTIF AMBITIEUX DE PERFORMANCE ÉNERGÉTIQUE
Afin qu’ils répondent aux besoins des bâtiments d’habitation contemporains (isolation thermique, sécurité incendie, acoustique), tous les plateaux (sur neuf niveaux) ont été remis à nu. Les anciennes cloisons ont été déposées. La façade a été remplacée et isolée par plusieurs couches d’isolant thermique (laine de roche). « Nous avons ainsi souhaité conserver la superstructure du bâtiment. Au niveau des façades, nous avons retravaillé le volume existant pour pouvoir l'insérer plus facilement dans le quartier, en recourant à un mode constructif à base de murs-rideaux, indique Clément Lourmière, architecte au sein du cabinet Letellier. Ce qui a induit de notre part un travail particulier, car les murs-rideaux sont plus dévolus à des bâtiments de bureaux. Il a fallu se conformer aux réglementations (sécurité incendie, acoustique) inhérentes aux bâtiments d'habitation. Le traitement des façades au moyen d'un bardage zinc et de surfaces vitrées, avec un jeu d’ondulations au niveau des lames de bardage verticales (qui jouent également le rôle d'occultations solaires), se veut un clin d’œil à la fois aux reflets à la surface du canal de Brienne et au flux de véhicules sur l’avenue de Brienne. »
En matière de performance énergétique, si l’objectif était d’aboutir à un bâtiment économe, le bureau d’études Math Ingénierie est parti d’une feuille blanche : « Dans la mesure où il s’agissait d’une rénovation entraînant un changement d’affectation, nous n’avions pas de référence en matière de classe énergétique sur l’existant pour de l’habitat, indique Jérôme Duhamel, Chef de projet pour Math Ingénierie. L’état des lieux correspondait à l’usage originel du bâtiment. Pour autant, nous avons visé un objectif de performance énergétique ambitieux. Sur la base de nos choix techniques, nos calculs thermiques [prenant en compte les améliorations thermiques en façade, en toiture, etc.] aboutissent à une consommation de 61 kWhep/m2.an sur ce bâtiment (classe B). Ce qui est très bon, dans la mesure où un programme BBC-Rénovation dans notre région se situerait autour de 72 kWhep/ m2.an ». La maîtrise d'ouvrage n'avait pas fait le choix de viser un label : rechercher la performance n’implique pas nécessairement l’affichage de cette performance !
Les choix techniques du BE se sont rapidement imposés, comme le confirme Hélène Aubineau : « Dans la mesure où le bâtiment était déjà raccordé au réseau de distribution de gaz, et eu égard au nombre de logements à alimenter en chauffage et en ECS, la chaufferie collective représentait l’option la plus indiquée. Nous n'avons donc pas hésité longtemps. » De plus, une solution en chaufferie collective permet de maîtriser le montant des charges et ainsi de respecter les budgets limités des étudiants. L’émission de chaleur dans les logements étudiants se fait via des radiateurs en acier moyenne température munis de robinets thermostatiques avec une variation temporelle performante, permettant un ajustement rapide de la température ambiante.
UNE CHAUFFERIE COLLECTIVE GAZ RÉNOVÉE EN PROFONDEUR
Le changement de destination du bâtiment a imposé de repenser totalement les équipements de la chaufferie. Les deux chaudières gaz d’environ 500 kW chacune dataient de la construction du bâtiment. Les trois groupes de production de froid dévolus à la climatisation devenaient obsolètes puisqu'il n'était pas question de climatiser les futurs logements, pour des raisons de coûts et de performance énergétique. La production d'ECS compatible avec les besoins des 153 logements (majoritairement des T1 mais quelques T2 et T3 en colocation) équipés de sanitaires et d’un coin cuisine devenait centrale dans la conception. Une solution basée sur une chaufferie gaz collective se révélait ainsi d’autant plus pertinente.
Math Ingénierie a préconisé l’installation de deux chaudières gaz à condensation haut rendement (2 x 225 kW) à trois piquages, dont une en appoint secours. Ces deux chaudières en cascade ont été dimensionnées pour fonctionner 70 % du temps tout au long de l'année. Seules, elles fonctionnent alternativement une semaine sur deux et, dans les périodes les plus froides, la régulation intégrée active les deux chaudières afin qu’elles respectent les températures de consigne, selon une loi d’eau indexée sur la température extérieure.
Ces deux chaudières présentent trois piquages leur permettant d’avoir deux circuits retours : des circuits moyennes températures, inférieures à 40 °C, et un circuit haute température, uniquement pour l’eau chaude sanitaire, de l’ordre de 60 °C, avec un départ commun. Les réseaux moyennes températures correspondent au réseau alimentant les radiateurs des logements, d’une part, et au réseau alimentant les batteries chaudes des CTA, dévolues à la préparation de l’air neuf dans un certain nombre de logements et d'espaces communs, d’autre part (voir encadré). « Les régimes de température en retour (des radiateurs, des batteries chaudes des CTA) étant inférieurs à 50 °C, cela permet aux chaudières de condenser une grande partie de l'année », précise Jérôme Duhamel.
Afin de préserver les occupants des 54 logements donnant sur l'avenue de Brienne du bruit environnant, un système double-flux a été préféré à un système de VMC, impliquant des entrées d'air au niveau des menuiseries du mur-rideau. Dans ces 54 logements, l'air neuf est prétraité au niveau de la CTA dédiée (5 200 m3/h) et insufflé via des bouches murales dans les pièces de vie et les chambres. Les autres logements sont équipés de VMC hygro B. Une autre CTA (1 000 m3/h) est dédiée au renouvellement d'air salles de réunion, bureaux et salles de vie (dédiées notamment au travail de groupe). Ces deux centrales sont remisées dans les locaux techniques du dernier étage, ainsi que l'extracteur de VMC. Les chaudières ont donc également pour charge de produire de l'eau chaude nécessaire à la préparation de l'air neuf des logements donnant sur l'avenue de Brienne et des communs. Un circuit de chauffage dédié alimente les batteries chaudes des CTA
PRODUCTION D'ECS COLLECTIVE EN INSTANTANÉ
Les chaudières présentant de faibles pertes de charge ont été associées à un collecteur « départ » commun à tous les réseaux, un collecteur « retour » moyenne température (radiateurs logements, et batteries chaudes des CTA) et un collecteur haute température (correspondant au réseau ECS), et non à des bouteilles de découplage. La production d’ECS se fait en instantané, via un échangeur à plaques de 420 kW. « Afin de pouvoir fonctionner sur une seule chaudière pour la production d’ECS, nous avons prévu un réservoir de stockage primaire de 2 000 litres, en amont de l'échangeur. La température de consigne de stockage est de 80 °C », ajoute Jérôme Duhamel. Sur le circuit secondaire ECS, le départ se fait à 60 °C et le retour à 55 °C. Un passage du retour ECS via l'échangeur au-dessus de 50 °C prémunit l'installation contre les problématiques liées à légionellose.