Le collège Jean-Racine, bon élève de la RE2020

Réalisation

Mis à jour le

Note moyenne :

4/5 (4 avis)

Cet établissement d’enseignement de 600 élèves situé à Saint-Brieuc a été reconstruit sur son site d’origine selon les canons de la réglementation environnementale. Il s’appuie sur un mode constructif performant, une centrale photovoltaïque ainsi qu’une solution de chauffage alliant gaz et géothermie. Une réalisation menée en site occupé et livrée au premier semestre 2021.

Carte d'identité

Date des travaux :
D’avril 2019 à septembre 2021
Localité :
Saint-Brieuc
Type de bâtiment :
Collège
Superficie :
7154 m2
Maître d'ouvrage :
Conseil général des Côtes-d’Armor
Architecte :
Nunc architectes
Bureau d'études thermiques :
Ingérop
Consommations observées :
14,7 kWhep/m 2.an

Destiné à être désaffecté au profit d’un nouvel établissement, le collège Jean Racine de Saint-Brieuc, construit au début des années 1960, s’est finalement vu offrir une seconde jeunesse. « Début 2017, l’enjeu était de reconstruire le collège Jean Racine en site occupé, par tranches, pour pouvoir inaugurer en même temps le nouveau collège d’Hillion, qui devait ouvrir ses portes à la rentrée 2020, concomitamment avec le collège Jean Racine rénové », confirme Maxime Morfouasse, chef du service patrimoine collèges au conseil départemental des Côtes-d’Armor.

Le conseil départemental, collectivité propriétaire du collège et maître d’ouvrage, lance alors un concours. À l’aube de la nouvelle RE2020, il souhaitait faire en sorte que le collège reconstruit fasse référence en matière de développement durable. « Parmi les quatre porteurs de projets candidats, le cabinet Nunc architectes est rapidement sorti du lot, pour son approche faisant la part belle au bioclimatisme et aux économies d’énergie, même si le choix de l’énergie primaire n’était pas encore arrêté à ce stade », souligne Maxime Morfouasse. La volonté de requalifier le milieu urbain à travers cette reconstruction/rénovation (le site compte également un gymnase et un réfectoire, soit trois bâtiments au total) a également convaincu le maître d’ouvrage.

Collège Jean-Racine à Saint-Brieuc (22) - Façade sud équipée d’un brise-soleil intégral en bois
Collège Jean-Racine à Saint-Brieuc (22) - Façade sud équipée d’un brise-soleil intégral en bois

UN CLOS ET COUVERT PERFORMANT

Dès la phase d’esquisse puis celles d’avant-projet sommaire et d’avant-projet détaillé, Nunc visait la RE2020. Il souhaitait suivre une approche en analyse du cycle de vie, un cheminement qui a conduit le cabinet d’architecture et son groupement à expérimenter le label E+C– (une première à l’époque pour un établissement scolaire dans la région). Le tout avec le soutien de l’ADEME, au travers d’un accompagnement et d’une subvention. Au départ, le groupement ambitionnait de hisser le bâtiment d’enseignement rénové au niveau E3C2, avant de revoir sa copie et de viser le niveau E3C1, en vertu d’un certain nombre de paramètres (voir le témoignage de Marie Le Potier, ingénieure HQE dans le bureau d’études Ingérop). Très porté sur la construction bioclimatique et passive, Nunc a souhaité favoriser l’inertie thermique des bâtiments en préconisant un mode constructif mixte bois/béton.

Pour le clos et couvert, la performance est au rendez-vous, affichant une très forte étanchéité à l’air, de 0,28 m 3/h.m 2 sous 4 Pa (soit un résultat deux fois plus performant que l’objectif réglementaire imposé aux bâtiments d’habitation, à savoir 0,6 m 3/h m 2 sous 4 Pa). Le choix des isolants devait concourir à la performance thermique de l’enveloppe, tout en limitant le contenu carbone de l’édifice : plutôt que la fibre de bois, le bureau d’études Ingérop a donc préconisé la ouate de cellulose.

Surplombant la circulation centrale du bâtiment d’enseignement, une grande verrière permet de valoriser les apports solaires passifs (chaleur, lumière) en saisons intermédiaires. Elle dispose d’ouvrants afin d’évacuer le trop-plein de chaleur en période estivale. Cerise sur le gâteau, des vitrages photovotaïques s’intègrent harmonieusement à la verrière. S’y ajoutent 200 m 2 de modules photovoltaïques classiques, installés sur la toiture opaque du bâtiment d’enseignement. « L’installation de ces modules PV permet au projet d’atteindre le niveau E3 » , précise Marie Le Potier.

Grande verrière équipée de vitrages photovoltaïques et d’ouvrants pour l’aération estivale.
Grande verrière équipée de vitrages photovoltaïques et d’ouvrants pour l’aération estivale.
Pompes à débit variable pour les circuits de chauffage
Pompes à débit variable pour les circuits de chauffage
Du photovoltaïque pour atteindre le niveau E3

Une centrale solaire PV de 200 m 2 a été installée sur la toiture opaque du bâtiment d’enseignement. En y ajoutant les vitrages photovoltaïques de la verrière, l’établissement jouit d’une puissance installée de 145 kWc. Cette centrale solaire assure près de 30% de la production d’énergie renouvelable dans le mix total du collège (auxquels s’ajoutent les kilowattheures géothermiques valorisés par la PAC gaz). Au même titre que pour les autres installations, la GTC du collège permet au chargé d’exploitation de suivre la production solaire au fil des mois, éventuellement d’identifier des dysfonctionnements de l’installation. Si, dans les faits, la quasi-totalité de l’électricité ainsi produite est consommée par les cinq CTA de l’établissement, le surplus est utilisé pour alimenter d’autres postes de consommation (comme l’éclairage). Le reliquat de production est injecté dans le réseau public de distribution. Préconiser une installation PV s’avère particulièrement pertinent dans le cas du collège Jean Racine, puisque les périodes de production PV coïncident avec le fonctionnement des différents équipements (notamment les CTA).

UNE PAC GAZ SUR PIEUX GÉOTHERMIQUES

En concertation avec le maître d’ouvrage, Ingérop a envisagé plusieurs scénarios pour la production de chauffage. « Nous avons progressivement affiné ce choix. Nous avons écarté les PAC électriques – qui requièrent beaucoup de vigilance en termes de réglages, de consommations électriques et de maintenance – ainsi que la biomasse, car gérer une chaufferie bois en plein centre-ville aurait été assez compliqué à mettre en œuvre et à exploiter vis-à-vis des riverains », argumente Maxime Morfouasse. Dès lors, une solution basée sur le recours à une PAC gaz géothermique a très vite séduit le maître d’ouvrage, dans la mesure où elle recourt à une technologie s’inscrivant dans la continuité des solutions gaz habituellement mises en œuvre, tout en tirant parti d’une source d’énergie renouvelable. Cette PAC gaz géothermique (37,6 kW) à absorption tire une partie de l’énergie qu’elle délivre à l’aide de trois pieux géothermiques de 100 m de profondeur.

Toiture du collège intégrant des panneaux et une verrière photovoltaïque
Toiture du collège intégrant des panneaux et une verrière photovoltaïque

À partir de ses deux sources d’énergie (géothermique et gaz), la PAC gaz à absorption génère la quasi-totalité des besoins annuels en chauffage de l’établissement. Une chaudière d’appoint de 60 kW lui est adjointe afin de fournir, en fonction de la loi d’eau en vigueur, le complément d’énergie nécessaire lors des périodes les plus fraîches. De fait, la PAC gaz doit fonctionner le plus longtemps possible au maximum de sa charge et à son meilleur rendement, en faisant en sorte que les températures de retour sur les circuits de chauffage soient les plus basses possible (idéalement, un delta T de 10 °C à 15 °C entre la température de départ et la température de retour). Un ballon tampon de 750 l assure le découplage entre la PAC et les départs des circuits. Celle-ci fonctionne à pleine charge pour stocker un maximum d’eau chaude dans ce ballon tampon. La température de départ pour les circuits de chauffage est de 55 °C.

Hall d’accueil couvert avec brise-soleil sur la façade sud
Hall d’accueil couvert avec brise-soleil sur la façade sud

SUIVI DES CONSOMMATIONS ET OPTIMISATION ÉNERGÉTIQUE

Au nombre de trois, les circuits de chauffage irriguent autant de zones du bâtiment d’enseignement : un circuit plancher chauffant pour le hall, un circuit pour les radiateurs des locaux administratifs ainsi qu’un circuit pour les radiateurs des salles de classe. Le plancher chauffant s’avère pertinent à plus d’un titre dans le hall : les besoins de chaleur y étant moindres, un mode d’émission basse température lui convient parfaitement. Par ailleurs, le plancher chauffant offre la possibilité de faire du free cooling dans le hall, dans les périodes les plus chaudes. Une température de consigne un peu plus élevée (20 °C) est affectée aux salles de classe. Mais c’est surtout la présence de planchers bois qui a conduit la maîtrise d’œuvre à opter pour des radiateurs dans les salles de classe. Chacun des trois circuits de chauffage est doté d’un système de comptage énergétique, afin que le responsable d’exploitation (épaulé dans un premier temps par la société CSA) puisse dresser un historique des consommations zone par zone. Ce système de comptage est d’ailleurs étendu à l’ensemble des équipements techniques, afin de dresser des comparatifs entre différents postes de consommation et ainsi rechercher des voies d’optimisation. Ingérop assure également une mission de suivi énergétique pour une durée de 2 ans, en s’appuyant sur la GTC que le responsable d’exploitation utilise pour le suivi énergétique. « Cette GTC vise à la fois au suivi et à l’optimisation des consommations, mais également à faciliter le passage de relais avec le responsable d’exploitation de l’établissement, après ces 2 ans de suivi », confirme ainsi Josselin Bidau, ingénieur génie climatique et énergétique chez Ingérop. Grâce à cette GTC conçue par l’intégrateur Yséa, il est possible d’éditer des synthèses de suivi énergétique relativement accessibles. « L’historique des consommations nous permet de remonter jusqu’à la mise en service des installations, qui jouissent par ailleurs d’un grand nombre de points de télérelève », ajoute Josselin Bidau.

Pompe à chaleur gaz géothermique 37 kW (France Air)
Pompe à chaleur gaz géothermique 37 kW (France Air)

L’analyse de ces synthèses de données issues de la GTC a déjà permis de dégager des pistes d’optimisation énergétique. Au niveau du bâtiment restauration, par exemple, il a été mis en évidence que le fonctionnement de la CTA spécialement chargée de compenser les déperditions énergétiques inhérentes au fonctionnement des hottes de cuisine pouvait être modulé de façon à faire des économies sur les consommations de gaz – les CTA étant pourvues de batteries chaudes pour la préparation de l’air neuf. « Plutôt que de recourir au mode réduit, la mise à l’arrêt de cette CTA a permis de diviser par deux sa consommation électrique et par trois sa consommation de gaz, relève Josselin Bidau. Il s’agit là d’une des plus importantes pistes d’amélioration que nous ayons proposées au maître d’ouvrage. »

Ce projet à l’état final est très fidèle à la proposition initiale du groupement en phase concours, à tel point que l’esquisse proposée par Nunc n’aura connu que très peu de modifications en phase projet. En mars 2020, le premier confinement consécutif à la pandémie de Covid nous a contraints à suspendre le chantier. Nous avons pu reprendre les travaux au mois d’avril en appliquant des protocoles sanitaires, avec une ouverture du collège le 2 juin, pour une centaine d’élèves seulement, avant de lancer la phase de démolition au mois de juillet de la même année.
Maxime Morfouasse

Maxime Morfouasse

chef du service patrimoine collèges, conseil départemental des Côtes-d’Armor

Nous avions déjà réalisé une opération avec de la PAC gaz, sur un programme de logements à Rennes, mais en aérothermie. Sur le collège Jean Racine, nous avons sollicité un foreur pour la réalisation des sondes géothermiques, avec un premier test de réponse thermique déterminant le nombre de forages nécessaires. En plus d’être installateurs, nous avons une activité maintenance, que nous allons mettre en œuvre très prochainement sur l’établissement(1). Le contrat de maintenance donnera lieu de notre part à un contrôle technique de l’ensemble des équipements ainsi que du système de régulation, au contrôle des fuites, etc. Nous effectuerons dans ce cadre deux visites préventives par an, en plus des éventuelles interventions de maintenance. » (1) Ce reportage a été réalisé en juillet 2022.
Guillaume Demoy

Guillaume Demoy

PDG de l’entreprise CSA

Le choix d’une déconstruction-reconstruction du site n’a pas eu d’incidence sur la dimension carbone du projet, puisque la démolition n’est pas prise en compte dans l’évaluation. Par ailleurs, le gymnase était exclu de l’évaluation C–. Nous avons travaillé main dans la main avec Nunc architectes pour réduire l’empreinte carbone du projet au maximum. Pourtant, il atteint “seulement” le niveau C1, à cause du lot VRD (cour de récréation, terrain de sport), dont le poids a handicapé le projet, à la grande frustration de la maîtrise d’ouvrage. Toutefois, le projet étant pilote dans le cadre de l’observatoire OBEC, nous avons pu faire remonter ces informations à l’ADEME, en vue notamment de retirer la VRD du périmètre d’évaluation.
Le Potier Marie

Le Potier Marie

responsable construction et aménagement durable, Ingérop

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