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Actualité

Le classement automatique des réseaux de chaleur : une obligation de raccordement mais de nombreux cas de dérogation

Mis à jour le
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Avec la loi Énergie-Climat, le classement des réseaux de chaleur (RCU) alimentés à plus de 50 % d’énergies renouvelables et de récupération devient automatique. Concrètement, cela revient à contraindre les bâtiments à proximité du réseau de chaleur classé - et donc les usagers de ces bâtiments – à se raccorder à celui-ci. Quelles sont les conditions associées à cette obligation de raccordement ? Existe-t-il des dérogations ? Éclairage.

 Chaufferie bois/gaz de l'un des réseaux de chaleur de la ville de Nantes
Chaufferie bois/gaz de l'un des réseaux de chaleur de la ville de Nantes

1. Qu’est-ce que le classement d’un réseau de chaleur ?

Le classement a pour effet de rendre obligatoire, dans un périmètre géographique donné, le raccordement au RCU de tout bâtiment neuf ou faisant l’objet de travaux de rénovation importants.

Depuis 2018, les collectivités avaient la possibilité de classer – de façon volontaire, par voie de délibération – les réseaux de chaleur (RCU) alimentés à plus de 50 % par des énergies renouvelables et de récupération (EnR&R) sur un périmètre géographique donné, et en respectant deux autres conditions : comptage par point de livraison et équilibre financier de l’opération assuré.

Cette disposition volontaire est devenue automatique avec la loi Énergie-Climat, est inscrite à l’article L. 712-1 du Code de l’énergie et applicable depuis le 1 er juillet 2023.

Il appartient à la collectivité de déterminer le périmètre géographique du classement ainsi que le seuil de puissance soumis à l’obligation de raccordement.

À défaut de délibération de la collectivité, des conditions par défaut s’appliquent : le périmètre géographique du classement sera le périmètre d’exploitation du RCU (territoire de la [ou des] commune[s]) et le seuil de puissance minimale fixé à 30 kW.

2. Quels sont les réseaux de chaleur concernés par le classement automatique ?

L’article L. 712-1 du Code de l’énergie prévoit qu’un RCU qui répond aux 3 critères ci-dessous fait l’objet d’un classement automatique :

  • le RCU est alimenté à plus de 50 % par une EnR : ce critère est apprécié sur la base de données déclaratives issues de l’enquête annuelle des RCU;
  • le RCU dispose d’un comptage des quantités d’énergie livrées par point de livraison ;
  • l’équilibre financier de l’opération est assuré. En pratique, la liste des 636 RCU classés par l’arrêté du 23 décembre 2022 ne tient compte que du premier critère, les deux autres étant réputés satisfaits. Toutefois, si elle juge le classement peu pertinent, la collectivité a la possibilité de délibérer pour ne pas classer le réseau de chaleur.

3. Quels sont les effets du classement automatique du réseau de chaleur ?

Les bâtiments concernés par le classement sont :

  • les bâtiments neufs dont le permis de construire est demandé postérieurement au classement ;
  • les bâtiments existants concernés par une extension ou une surélévation supérieure à 150 m² ou à 30 % de la surface initiale.

La loi prévoit un seuil minimal de puissance de 30 kW. Par délibération, la collectivité peut modifier ce seuil. C’est, par exemple, ce qu’a fait la ville de Paris, en choisissant de fixer un seuil de puissance à 100 kW.

4. Quelles sont les consommations concernées ?

L’obligation de raccordement n’implique pas d’obligation de consommation de l’intégralité des besoins auprès du RCU. Ainsi, il pourra être envisagé une hybridation du système de chauffage / ECS avec une partie des besoins assurés par le RCU et une autre par un système alternatif fonctionnant au gaz : une chaudière à très haute performance énergétique ou une pompe à chaleur hybride par exemple.

Chaufferie gaz dun immeuble résidentiel
Chaufferie gaz d'un immeuble résidentiel

5. Dans quels cas est-il possible de déroger à cette obligation de raccordement ?

Bien que le classement automatique d’un RCU s’accompagne d’une obligation de raccordement des usagers à ce réseau, le décret du 26 avril 2022 prévoit quatre cas dérogatoires.

1/ L’incompatibilité technique

Dans certaines situations, les caractéristiques du bâtiment à raccorder peuvent être incompatibles avec le réseau de chaleur et donc justifier une dérogation pour incompatibilité technique. Voici quelques exemples non exhaustifs d’incompatibilité technique qu’il est possible de rencontrer :

  • lorsque le réseau de chaleur fonctionne à un régime de température dit « basse température » et que le bâtiment à raccorder dispose d’un réseau intérieur haute température ;
  • lorsque les caractéristiques du bâtiment ne permettent pas la mise en place d’une sous-station, soit par manque de place, soit parce que les caractéristiques du local chaufferie existant sont incompatibles avec les exigences de la réglementation en vigueur concernant les sous-stations de réseau de chaleur, qui peut, par exemple, impliquer un ou plusieurs accès directs depuis l’extérieur.

2/ L’impossibilité de raccordement dans les délais nécessaires

Le client peut demander une dérogation si l’installation de son bâtiment ne peut pas être alimentée en énergie par le réseau de chaleur dans les délais nécessaires à la satisfaction de ses besoins de chauffage, d’eau chaude sanitaire ou de climatisation.

Ce cas de figure peut, par exemple, se présenter dans le cas du remplacement d’une chaudière suite à une panne. Le caractère d’urgence peut alors être invoqué pour remplacer au plus tôt la chaudière. Toutefois, l’exploitant du réseau de chaleur a la possibilité de proposer la mise en place d’une solution transitoire, dans l’attente de l’alimentation par le RCU.

3/ La dérogation pour solution EnR alternative plus vertueuse

L’article R. 712-1 du Code de l’énergie précise qu’il est possible de déroger à l’obligation de raccordement si le demandeur justifie de la mise en œuvre, pour la satisfaction de ses besoins de chauffage, d’eau chaude sanitaire ou de climatisation, d’une solution alternative alimentée par des énergies renouvelables et de récupération à un taux équivalent ou supérieur à celui du RCU classé.

Autrement dit le gaz vert, consommé, par exemple, via un contrat gaz vert (dès lors que le taux de gaz vert du contrat est équivalent ou supérieur au taux EnR du RCU classé), permet donc d’y déroger. En effet, l’article L. 211-2 du Code de l’énergie liste les sources considérées comme « énergies renouvelables ». Le biométhane étant une énergie renouvelable, il s’y retrouve logiquement, ce qui permet de considérer un contrat de consommation de gaz vert comme une justification suffisante pour déroger à l’obligation de raccordement à un réseau de chaleur.

À noter : pour les consommations inférieures à 300 MWh/an, le site du médiateur de l’énergie permet de comparer les offres de gaz vert disponibles. Au-delà, il faut se rapprocher du fournisseur de son choix.

4/ Dérogation pour critère économique

Conscient que le raccordement et l’utilisation d’un réseau de chaleur peuvent avoir un coût important pour l’usager, le législateur a prévu la possibilité de déroger si le demandeur justifie de la « disproportion manifeste du coût de raccordement et d’utilisation du réseau » par rapport à une autre solution.

En pratique, cette dérogation, telle que rédigée dans les textes, peut donner lieu à des incertitudes sur la manière de calculer les coûts à comparer ainsi que sur l’appréciation de la « disproportion manifeste ». La loi ne précisant pas les modalités de calcul, le demandeur est donc libre de faire ses calculs de la manière la plus objective possible, en prenant en compte les coûts d’investissement (CAPEX) et d’utilisation (OPEX).

À noter : certaines collectivités ont défini, par délibération, les modalités de calcul ainsi que le seuil de disproportion. C’est, par exemple, le cas de la ville de Paris.

MA NOTE